Esprit critique es-tu là ?

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Comment sont fabriquées et… regardées les images auxquelles nous sommes exposés en flot continu ? Le Pavillon Blanc de Colomiers présente des œuvres d’artistes qui interrogent notre relation à l’image et ses usages numériques. Un programme associé à l’exposition « Esprit Critique : Détrompez-vous ! » et co-produit par le Quai des Savoirs.

Les images, désormais, nous accompagnent partout. Elles sont informatives, récréatives, commerciales, brutes ou retouchées, voire artificiellement fabriquées et, sous leur flot, nous peinons parfois à démêler leurs origines et leurs intentions. Ce flou artistique alimente la réflexion des plasticiens réunis au Pavillon Blanc de Colomiers dans l’exposition « Images Flottantes » présentée jusqu’au 20 août dans le cadre du programme « Esprit critique es-tu là ? ». Une programmation culturelle associée à l’exposition du Quai des Savoirs « Esprit Critique : Détrompez-vous ! ».

Regards croisés sur la fabrique des images

Dans leur série de collages intitulée Paparazzi, Mazaccio & Drowilal détournent ces photos de stars prises dans leur quotidien, pour révéler le côté factice de ces intimités mises en scène.

À travers le portrait Aurélien, troll d’Internet, et l’œuvre Troll Just Want To Have Fun, Caroline Delieutraz met en lumière les trolls, pirates cachés du web qui jouent avec les réseaux et les données. Par ailleurs, dans Deux visions, une série de diptyques, elle interroge la représentation de la réalité portée par des images Google Street View en les confrontant au travail documentaire du photographe Raymond Depardon.

L’installation G255 d’Alain Josseau joue avec la nature équivoque des images numériques où le vrai et le faux s’entremêlent souvent. Son dispositif produit automatiquement et en direct de fausses images de guerre (générées par le mixage de prises de vue de maquettes et d’images recueillies sur Internet). « On montre au public les mécanismes de la post production, commente Alain Josseau. Car les gens peu habitués pourraient se faire leurrer s’ils n’ont pas l’œil éduqué ».

Sa seconde œuvre exposée au Pavillon Blanc, Mossul vs Bull Run superpose deux scènes de batailles exposées en direct au regard du public. Une bataille de la guerre de Sécession aux Etats-Unis (1861-1865) à laquelle des civils assistent depuis le haut d’une colline, et des images (parfois fausses) de l’offensive sur Mossoul en Irak, le 17 octobre 2016, diffusées et commentés en direct sur le Web.

L’ingénieur et l’artiste en résidence au Quai des Savoirs

Depuis le premier partenariat avec le Pavillon Blanc en 2017, le Quai des Savoirs accueille en résidence des artistes exposés au centre d’art de Colomiers.

Pour la précédente exposition « S’attabler » (2020), des ingénieurs agronomes et des paysans avaient contribué à un dispositif de dialogue autour de la transition agro-écologique. Ce mois de mai 2022, Alain Josseau a bénéficié de l’expertise de Guilhem Saurel, ingénieur de recherche au LAAS (Laboratoire d’analyse et d’architecture des systèmes — LAAS-CNRS) et de Guilhem De Gramont, spécialisé dans la fabrication de machines artistiques.

Objectif, finaliser la construction d’un robot pour remplacer l’avatar qui incarnait jusqu’à présent la présentatrice de l’installation Automatic War. Ce dispositif imaginé par Alain Josseau reproduit un journal télévisé relatant une guerre sans fin menée par des machines se combattant entre elles (illustré avec de fausses images sur le même principe que pour G255).

« Accéder à ce lieu offrant un lien entre arts et science me permet d’extraire un ingénieur du LAAS de son labo cinq jours durant. Inimaginable ! », se réjouit l’artiste toulousain. « Nous allons pouvoir réfléchir tous ensemble et finaliser ce travail en concentrant nos forces : Guilhem Saurel sur la programmation, Guilhem De Gramont sur la motorisation et moi sur la composition du visage en latex silicone ».

Le résultat de cette résidence sera présenté le 21 mai au Pavillon Blanc.

Par ailleurs, le fruit de la résidence alimentera la présentation d’une œuvre d’Alain Josseau lors du prochain festival « Lumières sur le Quai », au Quai des Savoirs à l’automne 2022.

Des ateliers pédagogiques pour aller plus loin

Ce partenariat entre le Quai des Savoirs et le Pavillon Blanc s’est concrétisé par la co-construction et le co-financement du programme qui fait véritablement écho à l’exposition du Quai des Savoirs. Un mélange d’expériences entre la démarche artistique et scientifique, le savoir et la création, qui s’illustre également dans un kiosque dessiné par le studio Pépite. Ces édicules affichent du vocabulaire lié au numérique et à l’information, des références, des questions invitant à réfléchir à nos pratiques d’information, etc., et fait le lien avec les autres espaces du centre columérin et de sa médiathèque.

Enfin, au Pavillon Blanc comme au Quai des Savoirs, cette démarche de réflexion active se prolonge par des ateliers d’éducation artistique et culturelle (EAC) et d’éducation aux médias (EMI), dans et hors les murs.


Crédit photos : @Pavillon Blanc